A silent voice – Yoshitoki Oima

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18 février 2015 par sweetmadonna

Nommée pour le prix Kodansha et le prix Manga Taisho, lauréat du « Nathalie Grand Prix 2014« , A silent voice était un titre attendu, aussi bien pour sa réputation flatteuse que pour son sujet rarement abordé. Et c’est Ki-oon qui s’est lancé dans l’aventure chez nous pour ce shonen en 7 tomes parlant de handicap et de harcèlement scolaire.

 

 

Ki-oon faisant souvent les choses en grand pour le lancement de nouvelles licences, voici l’annonce effectuée suivie de deux vidéos « bande-annonce », chacune mettant en scène l’un des personnages principaux, et d’un extrait en ligne :

 

Les éditions Ki-oon sont très heureuses de vous annoncer leur premier coup de cœur éditorial pour l’année 2015 : A Silent Voice (Koe no katachi) !

Centrée autour du handicap, l’histoire d’amour contrariée de deux adolescents que vous n’êtes pas près d’oublier…

L’auteur,Yoshitoki OIMA, n’a que 18 ans en 2008, lorsqu’elle participe à un concours jeunes auteurs chez Kodansha, qu’elle remporte. À cause du sujet sensible de son œuvre, il faudra attendre 2011 pour que le public japonais puisse à son tour découvrir son travail.
One-shot décliné en série à partir de 2013, A Silent Voice devient un véritable phénomène au Japon et réussit à rafler, contre toute attente, la première place du vote des lecteurs du Bessatsu Shonen Magazine (Kodansha), devant le best-seller du moment au Japon :L’Attaque des Titans !!

 

 


A Silent Voice – sortie du tome 1 le 22 janvier 2015
(Yoshitoki OIMA, shônen, 6,60 €)

Shoko Nishimiya est sourde depuis sa naissance. Même équipée d’un appareil auditif, elle peine à saisir les conversations, à comprendre ce qui se passe autour d’elle. Effrayé par ce handicap, son père a fini par l’abandonner, laissant sa mère l’élever seule.

Quand Shoko est transférée dans une nouvelle école, elle s’emploie à surmonter ses difficultés mais, malgré ses efforts pour s’intégrer dans ce nouvel environnement, rien n’y fait : les persécutions se multiplient, menées par Shoya Ishida, le leader de la classe. Tour à tour intrigué, fasciné, puis finalement exaspéré par cette jeune fille qui ne sait pas communiquer avec sa voix, Shoya décide de consacrer toute son énergie à lui rendre la vie impossible.

Psychologiques puis physiques, les agressions du jeune garçon se font de plus en plus violentes… jusqu’au jour où la brimade de trop provoque une plainte de la famille de Shoko, ainsi que l’intervention du directeur de l’école. À cet instant, tout bascule pour Shoya : ses camarades, qui jusque-là ne manquaient pas eux non plus une occasion de tourmenter la jeune fille, vont se retourner contre lui et le désigner comme seul responsable…

Un manga pas comme les autres, qui réussit avec brio à parler de handicap de manière juste et touchante !

 

 

 

Pour l’extrait en ligne, c’est par là : http://www.ki-oon.com/preview/asilentvoice/index.html

 

Voilà donc pour une rapide présentation globale du titre, made in Ki-oon. Essayons désormais de parler du contenu. Ce premier volume se pose comme une longue introduction qui nous permet de faire connaissance avec notre « héros », Shoya, enfant perturbateur, espiègle, à l’affût de la moindre petite aventure qui pourrait lui permettre de tromper son ennui profond de sa courte et déjà fatigante vie. L’arrivée de Shoko dans sa classe va lui donner de nouvelles idées, un nouvel élan, et il va progressivement se positionner en leader de la classe, celui qui mène la danse. Mais pas n’importe quelle danse : celle de la persécution continue, des brimades plus ou moins violentes, des moqueries incessantes… L’objet de cet acharnement ? Même si l’objet est toujours sujet à caution, il s’agira ici du handicap qui touche Shoko : elle est malentendante et tente donc, tant bien que mal, de communiquer avec ses camarades grâce à un carnet, ses appareils auditifs ne l’aidant pas forcément beaucoup. Si je parle d’une longue introduction pour ce premier volume, c’est surtout parce qu’il commence avec un Shoya plus grand, désormais lycéen, qui semble retrouver Shoko des années après ces événements malheureux. L’ancien tortionnaire va-t-il réussir à se faire pardonner ?

 

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Yoshitoki Oima aborde avec A silent voice un thème qui, s’il a déjà été abordé quelques fois dans le manga, reste malgré tout relativement en retrait malgré sa présence quasi quotidienne à l’école, que ce soit au Japon ou chez nous. Appelé ijime chez nos amis nippons, bullying dans les pays anglo-saxons, le harcèlement scolaire est présent partout, dans tous les pays, sous tout un tas de formes et même s’il est régulièrement minoré, tout le monde a, un jour, soit vécu soit assisté à des scènes de ce type au cours de sa scolarité. Le hasard a par ailleurs voulu que A silent voice sorte chez nous quelques jours avant un reportage sur France 2 traitant du sujet, reportage qui a délié certains langues et que je vous invite à voir ou revoir sur le site de France 2 : http://www.france2.fr/emissions/infrarouge/videos/117423015

 

Si, déjà, le thème du harcèlement scolaire, central dans ce titre, permet à A silent voice de sortir du lot, le coupler au thème du handicap d’un enfant le rend encore plus spécial. Yoshitoki Oima aborde alors tout un aspect de l’enfance, qui part de la vie en communauté obligatoire que constitue le cadre scolaire au rapport à l’autre, différent, qui doit vivre avec son handicap et tenter de s’intégrer. Shoya apparaît évidemment comme le grand méchant de l’histoire, et c’est assez normal vu son comportement envers Shoko. Mais il montre aussi ce monde terrible de l’enfance, où tout peut changer rapidement et le tortionnaire peut devenir la victime en un rien de temps. Les adultes ne sont évidemment pas épargnés, qu’il s’agisse des parents ou des professeurs, parfois complices, qui font souvent la sourde oreille et ne se réveille que pour rejeter la faute sur la cible idéale.

 

Finalement, le seul point qui pourrait rebuter certains lecteurs est, comme souvent, le graphisme. Loin des standards habituels, il n’est bien évidemment pas mauvais ni repoussant, mais son originalité peut de prime abord avoir un effet repoussoir sur certains, comme on le voit très souvent. Mais il ne s’agit pourtant pas là d’un défaut, certaines pages étant superbes et l’ensemble efficace : dynamique, sentiments parfaitement retranscrits, découpage de qualité, chara-design varié… Bref, pas de défaut majeur et une vraie personnalité, qui manque bien trop souvent à la production actuelle.

 

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Si on se demande ce que la suite de cette histoire va bien pouvoir donner, si certains passages font forcément échos au fond de beaucoup d’entre nous, A silent voice réussit en un seul premier volume à rappeler des évidences, à remettre sur le tapis le long débat trop souvent repoussé du harcèlement scolaire, dont les conséquences peuvent être catastrophiques pour nombre d’enfants trop fragiles et pas assez aidés, protégés ou soutenus. Si, avec le reportage de France 2, A silent voice peut permettre une vraie prise de conscience, un grand pas sera fait. Et il est toujours rassurant de voir que cela peut aussi se faire par le biais de la bande dessinée. Typiquement le genre de manga qui devrait être disponible dans les bibliothèques de tous les établissements de France, en tant qu’objet de prévention. Un titre d’utilité publique.

 

2 réflexions sur “A silent voice – Yoshitoki Oima

  1. Heyden dit :

    Joli article. En ce qui me concerne, j’en ai parlé à la documentaliste de mon établissement. Elle a commandé trois exemplaires lol. Elle est très ouverte aux autres genres puis comme les gosses ne sont pas des fans de lecture en plus, c’est toujours une « porte ouverte ». Le premier tome reste quand même une grosse introduction et on sent bien qu’il n’est pas entièrement abouti mais il est assez bien pour amorcer la suite. La suite est encore mieux pour moi avec des passages vraiment bouleversants…

    • sweetmadonna dit :

      Oui, on est clairement dans une grosse introduction. Mais avec ce seul tome, l’auteur parvient à remettre sur le devant de la scène le sujet grave du harcèlement scolaire, avec toutes ses dérives et toutes les composantes qui y mènent, en découlent et, sans forcément le vouloir, l’encouragent. Que ta documentaliste en ait pris pour chez vous, c’est une très bonne nouvelle ! Et si la suite est encore meilleure, c’est aussi une bonne nouvelle ! Et merci pour le compliment ! 😉

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